Wolfgang Mozart, Correspondance

Wolfgang Mozart, Correspondance

& "La vaisselle blanche avec les perce-neige"....

                                               

                                                        

 

 

 

                                                                                       

 

Note :  Je n'ai pas recopié toutes les lettres écrites à Constance  (il faut bien que j'incite aussi à acheter la correspondance).  Mais elles témoignent toutes d'une grande tendresse pour sa femme,  d'un désir permanent, et surtout,  du souci qu'il se faisait sans arrêt pour elle et sa santé.  Le compositeur semble bien s'être oublié un peu pour elle,  sans doute était-ce dans sa nature.  Toutes les lettres démentent donc d'elles-mêmes,  que pendant ce temps là,  il faisait des galipettes avec des Storace ou autres  Magdalena.  Et ceux qui le croient le prennent donc pour un fieffé hypocrite,  et insultent donc sa mémoire sans le moindre scrupule. 

 

   En plus,  on se demande bien , en voyant le ton de ses lettres, parfois même un peu naîf, comment l'homme qui les écrivait pouvait dans un même temps sombrer dans la débauche,

comme certains l'ont prétendu, ou, encore plus sournoisement, laisser entendre.  Je me

demande si l'on a bien pris  conscience à quel point c'est ridicule .

 


&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&

 

 

 

 

 

 

Vienne,  les 7 et 8 octobre  1791

Vendredi à 10 heures et demie du soir

 

 

 

 

Très chère,  excellente petite femme  !

 

   Je reviens à l'instant de l'opéra.  Il était plein,   comme toujours.

  Le duo Mann ans Weib, etc.,  et le glockenspiel du premier acte ont été bissés comme d'habitude.  De même que le trio des jeunes garçons,  au  2ème acte.  Mais ce qui me fait le plus plaisir,  c'est le succès silencieux  !  On sent bien que la cote de cet opéra ne fait que monter.

   Voici maintenant mon emploi du temps  :

   Tout de suite après ton départ, (pour Baden),  j'ai fait 2 parties de billard avec M. Mozart (celui qui a écrit l'opéra chez Schikaneder).  Puis j'ai vendu mon canasson pour 14 ducats.  Ensuite,  j'ai demandé à Joseph d'appeler Primus  (Joseph et Primus sont une seule et même personne aussi).  pour qu'il aille me chercher du café que j'ai bu en fumant une merveilleuse pipe de tabac.   Puis j'ai instrumenté tout le Rondo de Stadler  (troisième mouvement du Concerto pour clarinette K 622). 

  Les Duschek vont tous bien.  Il me semble qu'elle n'a pas reçu de lettre de toi,  et pourtant,  j'ai du mal à le croire   !   -suffit-  ils sont déjà tous au courant du magnifique accueil réservé à mon opéra.

   Le plus curieux de tout cela,  c'est que le soir où mon nouvel opéra a été donné pour la première fois avec tant de succès,  ce même soir,  on interprétait pour la dernière fois à Prague le Titus,  avec un égal succès extraordinaire.   Tous les morceaux ont été applaudis...

   A  5 heures et demie,  je suis sorti par la Stubentor,  et ai fait ma promenade favorite jusqu'au théâtre en passant par le Glacis.   Et que vis-je  ?  Qu'humai-je  ?  Don Primus avec ses carbonades  !  che gusto  !  maintenant,  je mange à ta santé.  Il sonne tout juste 11 heures.  Peut-être dors-tu déjà   ?  chut ! chut ! chut !  Je ne veux pas te réveiller.

 

Dimanche  8  -   J'aurais voulu que me voies diner hier soir  !  Je n'ai pas trouvé notre  vieille  vaisselle,  j'ai donc pris la blanche avec les perce-neige,  et ai posé le chandelier à deux branches avec des bougies devant moi  !...   

                                                                                                

 

   Tu seras maintenant en plein bain alors j'écris ceci .  Le coiffeur est venu à 6 heures précises,  et Primus a fait du feu dès 5 heures et demie,  puis il m'a réveillé à 6 heures moins le quart.  
   Pourquoi faut-il qu'il pleuve juste maintenant  ?  J'espérais que tu aurais beau temps  ! Couvre toi chaudement pour ne pas t'enrhumer.  J'espère que le bain te permettra de  passer un bon hiver. Car seul le souhait de te garder en bonne santé m'a fait te pousser à aller à Baden.  Je m'ennuie déjà de toi,  je l'avais prévu.  Si je n'avais rien à faire,  je partirai tout te suite te rejoindre pour 8 jours.  Mais là-bas,  je n'ai aucune commodité pour travailler.  Et j'aimerais bien,  autant que possible, éviter tout embarras.  Rien n'est plus agréable que lorsqu'on peut vivre un peu tranquille,  c'est pourquoi il faut bien travailler,  et je le fais volontiers.

 

   Donne en mon nom quelques bonnes paires de gifles à  (nom barré par Nissen  :  Sussmayr)  et demande à  (nom barré par Nissen  :  Sophie) , que j'embrasse 1000 fois de lui en administrer quelques unes aussi,  au nom de Dieu,  qu'il n'en manque pas  !   Je ne voudrais pour rien au monde qu'il puisse me reprocher,  aujourd'hui ou demain,  que vous ne l'avez pas bien servi et soigné,  donnez lui plutôt trop de coups que pas assez.

   Il serait bon que vous lui pinciez le nez avec une écrevisse,  que vous lui arrachiez un oeil ou lui asséniez quelque blessure visible,  afin que le bonhomme ne puisse nier avoir reçu quelque chose de votre part.

 

(du coup,  en le recopiant, ça me fait un peu rire quand même,  mais quelle étrange façon de s'amuser...)

 

   Adieu,  chère petite femme,  la voiture s'en va.  J'espère recevoir à coup sûr une lettre de toi aujourd'hui  et dans ce doux espoir,  je t'embrasse 1000 fois et suis à jamais ton

 

époux qui t'aime

W.A.  Mozart

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Vienne,  les 8 et 9 octobre 1791

Samedi soir à  10 heures et demie

 

 

   Très chère,  excellente petite femme  !

 

  C'est avec le plus grand plaisir et un sentiment de joie que j'ai trouvé ta lettre à mon retour de l'opéra.  Il a été donné dans un théâtre comble ,  et avec le succès et les bis habituels.  Demain,  on le redonnera,  mais lundi,  il y aura relâche.

 

   Je viens d'ingurgiter un délicieux morceau d'esturgeon que D. Primus m'a apporté (il est vraiment mon fidèle valet de  chambre).  Et comme j'ai aujourd'hui un solide appétit,  je l'ai envoyé m'en chercher encore un peu,  si c'est possible.  Entretemps,  je continue donc ma lettre.

   Ce matin,  j'ai composé assidûment  (Le Requiem),  au point que je me suis attardé jusqu'à 1 heure et demie.  Je me suis précipité chez Hofer (pour ne pas manger tout seul) et y ai rencontré maman  (Cécilia Weber,  sa belle-mère).  Tout de suite après le déjeuner,  je suis rentré à la maison et ai écrit jusqu'à l'heure de l'opéra.  Leutgeb m'a demandé de l'y emmener une nouvelle fois,  et c'est ce que j'ai fait .   Demain, j'y conduis maman.  Hofer lui a déjà donné le livret à lire au préalable. Pour maman,  on pourra bien dire qu'elle a Regardé l'opéra,  mais pas qu'elle l'a Entendu...

 

   (mots barrés par Nissen)  avaient aujourd'hui une loge.  (noms barrés) ont manifesté très fort leur approbation sur tout, mais Lui,  qui sait tout,  s'est révélé Bavarois au point que je n'ai pu rester,  sinon j'aurais dû le traiter d'âne.  J'étais là au moment où commencait le 2ème acte,  donc lors de la scène solennelle.  Il riait de tout... Au début, j'ai perdu patience et ai voulu attirer son attention sur certains dialogues,  mais - il riait de tout !  C'en fut trop,  je le traitai de  "Papageno", et partis,  mais je ne  crois pas que l'imbécile ait compris..

   Je suis donc allé dans une autre loge, où se trouvaient Flamm et sa femme.  Là, je savourai mon plaisir et restai alors jusqu'à la fin.   Je ne suis allé à l'orchestre qu'au moment de l'air de Papageno avec le glockenspiel,  car j'avais envie de le jouer moi-même aujourd'hui.  Par plaisanterie,  j'ai fait un  Arpeggio,  à un moment où  Schikandeder marque une pause.  Il sursauta,  regarda vers l'orchestre et me vit.  Lorsque cela revient une 2ème fois,  je ne le fis pas,  il s'arrêta alors et ne voulait pas continuer.  Je devinai ses pensées et fis à nouveau un accord.  Alors il frappa son glockenspiel et dit  Ferme la.   Tout le monde se mit à rire.  Je crois que nombreux sont ceux qui ont découvert,  par cette plaisanterie,  que ce n'est pas lui qui joue cet instrument.

   Par ailleurs,  tu ne peux pas savoir comme il est charmant d'entendre la musique à partir d'une loge située près de l'orchestre,   c'est beaucoup mieux qu'à la galerie.. Dès que tu reviendras,  il faudra que tu essayes

 

 

                &&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&

               

                &&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&                

 

 

 

 

&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&& 

 

 

 

 

 

 

Dernière  lettre de Mozart....  

 

                                                                                              

 

 

                                                                                                                  

Vienne,  le 14 octobre  1791

 

                                                                                                    

Très chère,  excellente petite femme,

 

  Hier,  jeudi  13,  Hofer m'a accompagné voir Carl.  (Il était en pension).  Nous y avons déjeuné, puis nous sommes rentrés en ville.  A  6 heures,   je suis passé en voiture prendre Saliéri et la Cavaliéri,  et les ai accompagnés à la loge...

 

(Ultime surprise,  dans cette dernière lettre  :  Mozart et Saliéri entretenaient donc sur la fin des rapports cordiaux,  et il semblerait bien que ce dernier était un des premiers à admirer publiquement sa musique ;  certains pensent que c'est hypocrite et cache une manigance,  moi pas.  Et,  au passage,  la Cavaliéri était bien la maitresse de Saliéri,  et n'a jamais été celle de Mozart).

 

   Puis je suis allé rapidement chercher maman et Carl que j'avais entre-temps laissés chez Hofer.  Tu ne peux imaginer combien tous deux ont été aimables,  comme non seulement la musique,  mais également le livret et tout l'ensemble leur ont plu.  Ils disent tous deux que c'est un opéra digne d'être interprété pour les plus grandes festivités devant le plus grand des monarques,  qu'ils le reverront certainement très souvent car ils n'ont encore jamais assisté à plus beau et plus agréable spectacle.   Lui écouta et regarda avec la plus grande attention,  et de la Sinfonie jusqu'au dernier choeur,  il n'est pas un morceau qui ne lui ait tiré un Bravo ou un Bello.   Quant à elle , elle n'en finissait pas de me remercier pour cette amabilité .

   Après le spectacle,  je les ai fait reconduire et ai soupé avec Carl chez Hofer.  Puis je suis revenu à la maison avec lui et nous avons tous deux merveilleusement dormi.  Ce n'est pas un petit plaisir que j'ai fait à Carl en l'emmenant à l'opéra.
Il a une mine magnifique. Pour  ce qui est de la santé,  on ne pourrait trouver meilleur endroit,  mais le reste est malheureusement misérable  !  Ils peuvent certes leur donner une éducation de bon paysan ! mais suffit,  et comme les études sérieuses  (que Dieu nous protège)  ne commencent que lundi, j'ai demandé qu'on laisse sortir Carl jusqu'à dimanche après le diner.  J'ai dit que tu aimerais le voir.

Demain,  dimanche,  je viens te voir avec lui ,  tu peux alors le garder avec toi,  sinon, je le reconduis dimanche après le diner chez Heeger  (La pension).  Réfléchis,  en un mois,   on ne peut rien gâcher, à mon avis  !   Entre-temps,  on peut règler l'affaire avec l'école des Piaristes,  et l'on y travaille vraiment.  Par ailleurs, il n'est pas pire qu'il n'était,  mais ne s'est pas amélioré non plus d'un cheveu.

  

  Il a toujours les mêmes mauvaises manières,  il rechigne volontiers comme toujours,  et étudie presque moins volontiers encore,  car là-bas,  à ce qu'il m'a avoué lui-même,  il ne fait que trainer dans le jardin pendant 5 heures le matin et 5 heures après le déjeuner.   En un mot,  les enfants ne font que manger, dormir,  et se promener.

 

   Leutgeb et Hofer viennent me rendre visite.  Le premier reste déjeuner avec moi, je viens d'envoyer mon fidèle camarade Primus chercher quelque chose pour le déjeuner.  Je suis très content de ce bonhomme,  il ne m'a laissé tomber qu'une seule fois et j'ai été obligé d'aller passer la nuit chez Hofer,  ce qui m'a fort ennuyé car ils dorment trop longtemps à mon goût.   Je préfère être à la maison où je suis habitué à mon emploi du temps,  et cette unique fois m'a mis de fort mauvaise humeur. 

   Hier,  j'ai perdu ma journée à cause du voyage à Perchtoldsdorf  (la Pension),  c'est pourquoi je n'ai pu t'écrire.  Mais que tu ne m'aies pas écrit,  toi,  pendant 2 jours, c'est impardonnable.  J'espère rececoir à coup sûr de tes nouvelles aujourd'hui.  Et te parler demain,  et t'embrasser de tout coeur.

   Porte toi bien,  à jamais ton

   le  14   8bre    791                        Mozart

   J'embrasse Sophie mille fois,  fais ce que tu veux avec  (Nom rayé par Nissen). Adieu.

 

 

 

 

 

                                  

 

 

 

 

                                                &&&&&&&&&&&&&&&&&

 

Derniers mots de cette lettre qui sembleront un peu énigmatiques, et un peu froids ?  ... QUI était Constance me semble la seule question qu'il faudrait vraiment se poser...

Arthur Schurig ne me semble pas avoir tout à fait tort, quand il note chez Mozart, à la fin de sa vie, un "désenchantement", une certaine lassitude physique et morale... (bien cachée).

 

 

 

&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&                                           

 

 

 

 

 

Extraits de l'aimé d'Isis,  Mozart Tome 4,  Christian Jacq

 

 

 

Prague,  le  16 octobre  1791

 

 

   Enfin,  Anton Stadler allait créer le Concerto pour Clarinette  (K 622,  célèbre 2ème mvt sur ce site).   Il faisait chanter un instrument nouveau que lui seul savait maitriser ...

   Parfaitement à son aise,  il offrit un moment de grâce aux auditeurs du Concerto,  cette musique d'un autre monde destinée à "La Grotte"..

 

   Sérénité,  détachement,  aspiration vers la lumière caractérisaient ce  chef-d'oeuvre.  On songeait aux paroles de l'abbé Hermès qui l'illustraient à merveille  :

 

 

 

     "Pense à être partout en même temps,  dans la mer,  et la terre, et le ciel,  pense que tu n'es jamais né,  que tu es encore embryon, jeune et vieux,  et au-delà de la mort....."

 

 

&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&

 

 

 

 Chapitre suivant  :

 

  Dernier Koechel...

 

 

 

               

                 

 

 

 

 

 



26/02/2013

A découvrir aussi